LA VACHE FOLLE

 ou Enigme de la 13ème Vache de Beuzeville                                  
Association de Défense de la Viande Bovine Française 
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Les vaches carnivores

Au lendemain du piteux échec de notre délégation aux négociations de Bruxelles sur l'agriculture, Jean-Pierre Elkabbach ne rate pas l'occasion lors de l'interview qu'il accorde à notre ministre de l'agriculture :

"Ne pensez-vous pas que l'on a exagéré en transformant des herbivores en carnivores, en faisant ingurgiter de la viande à des animaux qui sont destinés dans la nature à manger de l'herbe."

Je cite de mémoire, mais la teneur du propos est bien celle qui est rapportée ici.

Jean Glavany eut dû depuis belle lurette s'être prémuni contre cette question qu'il pouvait attendre de notre coutumier de la polémique. Il s'embrouille. L'autre en remet à propos du productivisme dans les élevages laitiers. Et les auditeurs n'ont plus qu'à en conclure que décidément on a bien fait d'interdire de farines animales nos braves bêtes à corne. "En voilà une idée folle!"

Sauf que...

Les herbivores en général, et les ruminants en particulier, couvrent leurs besoins en protéines à partir d'aliments riches en cellulose (herbe, foin, ensilage, pailles de graminées, légumineuses, cruciféres, etc), qu'ils fermentent dans des "poches" situées en dérivation sur un tube digestif remplissant les fonctions fondamentales de la digestion, les mêmes quelle que soit l'espèce animale. En résumé l'équipement en enzymes de notre tube digestif nous permet d'extraire des aliments que nous ingérons les éléments nécessaires au fonctionnement de notre organisme grâce à l'absorption de molécules très simples au travers de la paroi intestinale. Il s'agit du glucose provenant de la digestion de l'amidon et des sucres alimentaires, des acides gras hydrolysés par les lipases des lipides de notre alimentation (huiles et graisses alimentaires) des acides aminés issus de la digestion des protéines, des minéraux et oligo-éléments, et des vitamines.

Le rumen ou panse est un énorme réservoir situé en dérivation entre l'oesophage et l'estomac proprement dit (la caillette), où s'accumulent les végétaux ingurgités sans mastication par les ruminants au pâturage ou à l'auge. Il a une contenance de l'ordre de 250 litres chez le boeuf adulte.

Ces animaux ont la possibilité de ruminer, c'est-à-dire qu'ils "régurgitent" les aliments stockés dans cette poche, afin de les réduire en fines particules grâce à leurs molaires, dont les surfaces en contact sont taillées comme la surface d'une meule et qui croissent pendant toute leur vie, pour pallier à l'usure de ces surfaces en contact. Après cette mastication accompagnée d"une insalivation, les aliments ruminés tombent à nouveau dans la panse et ils y subissent l'action des micro-organismes, en développant des réactions biochimiques très complexes et très intenses, favorisées par la température élevée qui règne dans ce milieu (une trentaine de degrés), permettant l'attaque de la cellulose par des bactéries cellulolytiques anaérobies (vivant en l'absence d'oxygène). On a ainsi une fermentation qui procure à ces micro-organismes l'énergie nécessaire à leur croissance et à leur multiplication. Comme ces réactions se passent dans un milieu dépourvu d'oxygène, la cellulose n'est pas dégradée complètement en eau et gaz carbonique comme cela se passe chez les aérobies (organismes qui ont besoin de l'oxygène pour vivre), mais cette fermentation donne naissance à des acides gras volatils (acétique, propionique, butyrique), qui sont évacués avec le liquide qui s'écoule de la partie inférieure du rumen vers l'estomac véritable (la caillette) après passage dans le réseau et le feuillet, autres diverticules de l'appareil digestif des ruminants, chargés de retenir les particules trop grosses s'échappant du rumen, parce qu'insuffisamment broyées lors de la rumination. Ces acides gras à courte chaîne sont utilisés facilement par l'organisme comme source d'énergie très métabolisable, en raison de leurs chaines à nombre réduit de carbones (2 à 4 seulement) qui en facilitent le catabolisme.

Pour leur croissance et leur multiplication,en dehors de l'énergie, ces micro-organismes de la panse ont besoin d'une source d'azote. Ils ne sont pas capables naturellement d'utiliser l'azote atmosphérique comme les bactéries des nodosités des légumineuses, mais ils se "nourrissent" de l'azote soluble contenu dans les aliments qu'ils ingèrent : protéines solubles, acides aminés libres, azote non protéique et même urée.

La capacité de synthèse des protéines des réservoirs gastriques esl limitée par leur volume, et même si l'on peut envisager des améliorations sensibles des rendements naturels, ils ne couvrent chez les vaches, les chèvres et les brebis laitières que les besoins d'entretien et seulement une partie des besoins de production, en particulier chez les animaux sélectionnés pour la production de lait. Il faut faire alors appel à des compléments alimentaires riches en protéines non solubles dans le milieu ruminal, un excès de dégradation de l"azote soluble dans le rumen, provoquant un surplus d'azote soluble mal ou pas utilisé par les micro-organismes et toxique, préjudiciable au bon fontionnement du rumen et à l"origine de troubles sanitaires.

C'est la raison pour laquelle, au delà d'une certaine production de lait par une vache donnée, il est nécessaire d'utiliser ces aliments riches en protéines non solubles, quelle que soit leur origine (animale ou végétale, en protéines protégées par un quelconque traitement techologique, un tannage par la chaleur, le formol ou les tannins.

Voilà la raison pour laquelle, tout "naturellement" oserais-je dire, on a pensé à utiliser les farines d'origine animale (farines de viande, farine de poisson) comme source de protéines pour les vaches laitières très bonnes productrices. La première utilisation rapportée dans la littérature scientifique dans un document de Paul Sanderson date de l"année 1900! Et en 1908, Kellner rapporte l'utilisation de sous-produits d'origine animale par Coe et Brian. Vers les années 1920, la distribution de farines animales "stérilisées" aux vaches laitières hautes productrices semble une évidence et le moyen normal de couvrir les besoins élévés de ces animaux en protéines de qualité (Professor Thomas). De nombreuses publications font référence à ces utilisations dans le monde entier (USA, Grande-Bretagne, Allemagne, Hollande, Australie). Et mes souvenirs de jeune formulateur me rappellent inévitablement ce qu'en disait la "bible" des nutritionnistes de l'immédiat après-guerre, le Morrison (1ère edition 1929 !).

Mes collègues contemporains dans l'alimentation animale en France vous diront que nous n'avons jamais formulé d'aliment pour ruminants contenant des farines animales : pas de farines de viande et d'os, pas même de farines de poisson jusqu'en... 1978. C'est, de mémoire, la date d'apparition dans la littérature de nouvelles normes établies par l'INRA, l'Institut National de la Recherche Agronomique, basées sur le concept des PDI, les protéines digestibles dans l'intestin. Il serait fastidieux de développer pour essayer de faire comprendre à des néophytes un concept que nombre de spécialistes ont eu quelque difficulté à bien assimiler à l'époque. Cette nouvelle approche de la nutrition azotée des ruminants domestiques, et en particulier des vaches laitières, couplée avec la généralisation de l'utilisation de l'informatique dans l'établissement des formules, eut tôt fait de démontrer l'intérêt des farines de viandes utilisées à faible dose (2 à 5%°) dans la fabrication des aliments complémentaires pour les vaches laitières ( VL), pour en diminuer le prix de revient.

Prudent, et intéressé à cette époque où je développais l'utilisation de "l'extrusion à sec" dans l'alimentation du bétail conventionnelle, nous avions préféré utiliser le traitement technologique des protéines végétales par la très haute température (de l'ordre de 180°) obtenue dans un extrudeur durant quelques secondes, au lieu des farines de viande dont la digestibilité n'était pas forcément la meilleure, compte tenu des traitements nécessaires à leur production. J'avais d'autre part une grande réticence vis à vis du traitement des tourteaux végétaux par le formol, que proposait l'INRA pour couvrir les besoins en PDIA des animaux à haute production laitière, au travers de sa concession à quelques entreprises de l'exploitation exclusive (et onéreuse) d'un brevet qu'ils avaient déposé. Après tout, le formol résiduel contenu éventuellement dans ces tourteaux tannés ne pourrait-il pas avoir une influence quelconque sur le devenir du prion "physiologique", même à doses infinitésimales? On a formulé des hypothèses beaucoup plus farfelues que celle-là, pour essayer d'expliquer des choses à peu près incompréhensibles en ce qui concerne les "NAIFS", ces cas de vaches folles apparaissant sur des animaux nés après 1996, date à partir de laquelle on est à peu près sûrs que le bannissement des farines animales des aliments vaches laitières a été effectif et contrôlé, pour ne pas dire garanti. Et ce ne sont pas les contorsions des experts à propos de la distribution accidentelle ou volontaire d'aliments porcs ou volailles à des vaches laitières qui peuvent apporter mon adhésion. Ces explications ne tiennent debout, en tout cas pour ce qui est de l'utilisation intentionnelle, les aliments vaches laitières étant la plupart du temps des aliments aux caractéristiques différentes du point de vue nutritionnel et coûtant généralement beaucoup moins cher que les autres. Sans compter que la spécialisation des exploitations rend le risque très faible. Quant à expliquer l'inexpliquable par les contaminations croisées, il faut n'avoir jamais mis les pieds dans les usines d'aliment actuelles pour parler d'un risque effectif. Il est vrai qu'on ne sait rien de l'utilisation des farines animales dans l'alimentationdes ruminants à dose... homéopathique !

L'apparition des grandes surfaces du commerce moderne et leur intérêt pour la distribution de viande sous cellophane a provoqué la création d'unités de préparation spécialisées, d'où l'on peut plus facilement récupérer les déchets de parage que dans les boucheries traditionnelles. Couplée avec la concentration de la profession des "renderers" aux USA, cette situation a provoqué la construction de nouvelles unités de traitement des "déchets" et des cadavres d'animaux utilisant un procédé en continu, beaucoup plus économe en énergie et en main-d'oeuvre, au lieu du traitement stérilisateur utilisé jusque là dans des autoclaves à température élevée sous très forte pression qui avait donné jusque là toute satisfaction, l'utilisation de températures plus basses que les températures conventionnelles se traduisant en outre par une "meilleure digestibilité" par les animaux qui les consommaient.

C'est en 1971 que la première unité utilisant cette nouvelle technique est autorisée et mise en route au Royaume-Uni. Aux USA, dès août 1976, les cadavres des moutons morts de la "tremblante" (scrapie) sont retirés de la circulation et détruits. C'est en 1985 que meurt la première vache atteinte de la "maladie de la vache folle" en Grande-Bretagne. "L'épidémie" se développe alors très rapidement, avec un pointe de plus de 37.000 cas cliniques en 1992 sur les bovidés anglais !

Très rapidement, en 1987,les chercheurs anglais font la relation entre la consommation de farine de viande avec l'ESB. Les farines de viande et d'os sont interdites en Grande-Bretagne dans les aliments pour bovins à partir du 1er janvier 1989.


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